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d’elle, au delà des monts de Savoie, l’Abbaye Bernardine d’Hautecombe voyait venir la tourmente qui devait l’emporter. Les moines se contre-passaient silencieusement, et le salut qu’ils se faisaient avait tout l’air du dernier salut. L’écho de la tempête leur arrivait de plus en plus terrible de la ville de Belley leur voisine. Celle-ci toute brûlante de la fièvre sociale, brisait avec les souvenirs de la seigneurie épiscopale, mais du moins ne versait pas le sang des victimes humaines, comme les tueurs de Danton.

À la veille des maux qui troublaient d’avance nos nuits et nos pensées du jour, chacun de nous contemplait pour la dernière fois la magnificence des flots sous le promontoire claustral. Douce et bleue comme le firmament, la liquide étendue était là, sympathique à nos peines, comme autrefois, aux douceurs de nos joies. La bordure des monts déjà fanée découpait tristement la double rive du lac. De l’une à l’autre