bon tireur, une carabine ordinaire semble avoir une portée double des autres, quoique les balles de mon ancienne carabine soient trop petites pour celle-ci, ce qui leur ôte beaucoup de force. »
Jusqu’à ce moment les sinuosités de terrain de la rive gauche que parcourait la petite troupe l’avaient mise à peu près à l’abri du feu des Indiens embusqués derrière les arbres de la rive droite ; mais les fugitifs arrivaient à un endroit où les bords du fleuve étaient unis et plats. C’était là le pas le plus dangereux à traverser, et, malgré, l’active surveillance du Canadien et de l’Espagnol, et leurs efforts pour distinguer un but derrière les arbres, une fusillade exécutée par des ennemis invisibles les accueillit au passage. Un des porteurs du canot tomba, trop grièvement blessé pour se relever, si deux de ses compagnons n’étaient venus à son aide.
Dans la crainte de s’exposer eux-mêmes, en se découvrant, à la redoutable carabine des deux chasseurs blancs, dont ils avaient tant de fois éprouvé l’infaillible justesse, les Indiens avaient tiré à peu près au hasard, à travers les troncs d’arbres. Sauf une balle qui effleura la chair de Pepe et n’emporta qu’un lambeau de sa manche, la fusillade ne fit pas d’autre mal aux fugitifs.
Cependant les porteurs du canot, réduits au nombre de deux, Gayferos et le Comanche, ne marchaient plus aussi rapidement. Chargés de leur compagnon mourant, les deux autres Indiens n’avançaient aussi de leur côté qu’à grand’peine, et l’autre parti d’Apaches, les plus à craindre parce qu’ils étaient les plus nombreux et qu’ils occupaient la même rive que les fugitifs, commençait à gagner sensiblement du terrain sur eux.
Deux fois les intrépides chasseurs, qui formaient l’unique corps de bataille de la petite troupe et sa seule défense, s’arrêtèrent pour faire face à l’ennemi, avec cette audace que semble respecter le danger, et deux fois un Indien tomba sous leurs balles.