nus en aide à leur compagnon, en un clin d’œil don Fabian aura été entouré et fait prisonnier avant d’avoir pu ramasser son arme. »
Bois-Rosé dut encore se contenter de cette explication ; car il s’était repris à espérer avec ardeur, après avoir triomphé de l’accablement d’esprit qui l’avait dominé. De grandes douleurs se payent parfois de raisons moins bonnes que celle alléguée par Pepe avec une conviction que le Canadien ne pouvait s’empêcher de partager.
Les deux chasseurs quittèrent alors cette portion de terrain qu’ils venaient d’explorer, pour gagner le sommet de la chaîne des rochers.
« J’en reviens à mon opinion, voyez-vous, Bois-Rosé, continua Pepe pendant que tous deux essayaient de percer les mystères d’un événement dont le terrain, lavé par des torrents de pluie, leur refusait toute explication plus satisfaisante ; don Fabian, entre les mains de cet abominable Sang-Mêlé, est un prisonnier qu’on essayera de gagner tour à tour par la crainte et par les promesses, et, comme le brave jeune homme se rira de l’une et méprisera les autres, il nous donnera d’une manière ou d’autre le temps d’arriver jusqu’à lui.
– Ah ! s’écria Bois-Rosé avec amertume, un vieux routier comme moi s’être ainsi laissé désarmer !
– Il est encore des armes qu’on ne nous enlèvera pas : c’est un bon couteau chacun, un cœur intrépide, je puis le dire, et la confiance en Dieu, qui ne vous a pas guidé si merveilleusement sur les pas de don Fabian pour vous l’enlever ainsi à jamais. Vous me direz à cela que la faim nous menace, c’est vrai.
– Qu’importe ? nous ferons comme ces pauvres diables d’Indiens mangeurs de racines, qui nous ont hébergés l’année dernière dans les Montagnes-Rocheuses, et qui ne se nourrissent que de fruits ou de racines sauvages.