Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome I, 1881.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du bandit. Ce fut dans ces dispositions qu’après un quart d’heure de marche rapide les trois cavaliers virent briller les feux qui signalaient la halte de la caravane, et gagnèrent enfin la Poza.

L’endroit qu’on nommait ainsi, et le seul où il y eût de l’eau en toute saison à dix lieues à la ronde, était une citerne qu’alimentait sans doute quelque source cachée, et dont l’orifice était plus large que celui des autres citernes. Elle était creusée au fond d’un petit vallon d’une dizaine de pieds de largeur en tous sens, dont les bords inclinés conduisaient l’eau des pluies dans ce précieux réservoir.

Ce vallon était couronné d’arbres dont l’épais feuillage, nourri par une sève vigoureuse, protégeait la citerne contre les rayons du soleil. Le gazon dont les bords étaient tapissés, la fraîcheur que répandaient les cimes entrelacées des arbres, faisaient de la Poza, au milieu de ces déserts, une oasis délicieuse.

En même temps que ce lieu servait de halte habituelle aux voyageurs, les chasseurs venaient aussi se mettre à l’affût dans ses environs, soit pour tirer les daims et les cerfs, soit pour guetter les jaguars et d’autres bêtes féroces que la soif y poussait de tous côtés.

Une de ces perches à bascule, dont le pays est plein, et qui sont semblables à celles de l’Algérie, servait à puiser l’eau à l’aide d’un seau de cuir attaché à l’une de ses extrémités, pour la faire couler dans des troncs d’arbres creusés en auge et y abreuver les chevaux des voyageurs.

À quelques pas de là, un bois épais, à travers lequel s’enfonçait la route de l’hacienda del Venado, offrait de verts et frais ombrages. Dans l’espace compris entre les abords de la Poza et la lisière du bois, on avait allumé un grand feu, d’abord pour combattre la fraîcheur glaciale des nuits après des journées brûlantes, et ensuite pour écarter de l’eau les jaguars ou les pumas qui pouvaient être tentés de venir s’y désaltérer.

Non loin de ce feu, qu’alimentaient les arbres morts de