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non de la conscience sans doute, mais de la perspicacité du bandit.

Quant à Tiburcio Arellanos lui-même, nous croyons superflu de dire ce que le lecteur a déjà compris : c’est que ce jeune homme n’était autre que Fabian, le dernier descendant des comtes de Mediana. Cuchillo vient d’expliquer comment le brick anglais, vainqueur du côtre français, l’avait transporté, après la captivité du matelot canadien, sur une terre étrangère. Là, désormais sans guide pour retrouver sa famille, déshérité des biens de son opulente et noble maison, orphelin de ceux qui avaient protégé son enfance et sa jeunesse, il ne possédait plus que ce que possède le plus pauvre dans ce pays : un cheval et une hutte de bambous.



CHAPITRE III

LE DERNIER DES MEDIANA.


Lorsque Cuchillo, à la fin de l’entretien dont nous venons de rendre compte, sortit de la cabane où il avait eu lieu, le soleil n’était déjà plus perpendiculaire, et commençait à s’abaisser vers l’horizon. La terre, desséchée par l’ardeur du jour, renvoyait les effluves brûlants dont elle dégageait son sein. Ces vapeurs, condensées par le vent, qui déjà soufflait plus frais, donnaient, par l’effet du mirage, aux plaines arides qui bordaient la forêt, l’aspect d’un lac limpide, comme si la nature, qui ne se plaît qu’aux parfaites harmonies, voulait offrir à l’œil une compensation à la triste nudité du paysage.

Des craquements sourds se faisaient encore entendre dans la forêt, pareils à ceux du bois qui se tord au contact du feu. Mais les arbres relevaient petit à petit leur