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jeune qu’il est, il a la réputation d’un rastreador[1] infaillible et d’un dompteur de chevaux intrépide. »

L’Espagnol semblait ne pas écouter Cuchillo, et cependant il ne perdait pas un mot de ce qu’il venait de dire ; mais peut-être en avait-il assez entendu, ou ce sujet de conversation lui était-il pénible, car il interrompit brusquement le bandit.

« Et vous croyez, dit-il, que, si ce rastreador infaillible, cet intrépide dompteur de chevaux sait le secret de son père adoptif, il ne peut pas être pour vous un dangereux concurrent ? »

Cuchillo se dressa fièrement.

« Je connais un homme, dit-il, qui ne le cède en rien à Tiburcio Arellanos pour suivre une piste et dompter un cheval sauvage ; et cependant ce secret n’est-il pas dans ses mains un secret à peu près inutile, puisqu’il vient de vous le vendre pour le dixième de sa valeur ? »

Ce dernier argument de Cuchillo était assez fort pour convaincre don Estévan d’une vérité incontestable, c’est que le val d’Or, entouré de tribus indiennes, comme l’avait dépeint le bandit mexicain, n’était accessible que pour une force assez considérable, et que lui seul pouvait disposer du nombre d’hommes nécessaires à sa conquête.

L’Espagnol rêvait et se taisait ; les révélations de Cuchillo au sujet du fils de Marcos Arellanos venaient d’ouvrir à ses yeux un autre ordre d’idées qui absorbaient toutes les autres. Disons ici que, pour des motifs qu’il n’est pas encore opportun d’expliquer, il cherchait à deviner si Tiburcio Arellanos n’était pas le jeune Fabian de Mediana.

Cuchillo, de son côté, réfléchissait à certains antécédents relatifs au gambusino Arellanos et à son fils adoptif, et se gardait de les mentionner pour de puissantes

  1. Trouveur de traces.