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de s’élancer vers cet abri ; mais son orgueil révolté le fit rester en place.

« Eh bien, vengez-vous donc sur un ennemi qui dédaigne de fuir ! cria fièrement le noble Espagnol à Pepe.

— Ne vous a-t-on pas dit, répliqua froidement ce dernier, que nous ne voulons vous prendre que vivant ? »



CHAPITRE XXXIX

LE CAPTIF.


Dans tout le cours de sa carrière aventureuse de soldat et de marin, le duc de l’Armada n’avait jamais couru de danger plus terrible que celui qui le menaçait.

La plaine ne lui offrait aucun abri contre les carabines du chasseur canadien et de l’Espagnol. Qu’étaient les armes à feu de ses cavaliers, entre leurs mains inhabiles, contre les rifles à canon rayé d’une portée double des leurs, maniés par deux tireurs dont le coup d’œil était infaillible et dont le bras ne tremblait jamais ? Ces redoutables adversaires avaient encore pour eux l’avantage d’une position inexpugnable et des créneaux de rochers derrière lesquels ils étaient retranchés. Que l’un des cavaliers fît un mouvement, un geste d’hostilité, et c’était fait au moins de deux d’entre eux.

Don Antonio ne se dissimulait pas toute l’étendue du péril auquel il était exposé ; mais, pour lui rendre justice, nous devons dire que son courage ne faiblissait pas. Cependant cette position ne pouvait se prolonger longtemps : tous le sentaient, en haut du rocher comme dans la plaine.