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même. Nous n’avons pas une minute à perdre. Pendant que vous et Bois-Rosé allez faire le tour de ce rocher, je vais donner un coup d’œil à travers ces cotonniers et ces saules.

— Je me défie de tout ce qui m’entoure dans ce mystérieux endroit, reprit Bois-Rosé. Ce cri que nous venons d’entendre révèle la présence d’une créature humaine : blanche ou rouge, elle est à craindre. Laissez-moi, avant de nous séparer, examiner le terrain près de nous. »

Tous trois baissèrent vers la terre des yeux accoutumés à lire sur sa surface comme dans un livre ouvert.

« Que vous disais-je, s’écria le premier le Canadien, voici l’empreinte des pieds d’un blanc, et je jurerais qu’il était ici il n’y a pas plus de dix minutes. »

En effet, des pieds d’hommes étaient marqués sur le sable, et l’un d’eux avait foulé du pourpier sauvage, dont les brins se relevaient doucement l’un après l’autre. Ces vestiges se dirigeaient vers la haie des cotonniers.

« En tout cas, il est seul, » dit Fabian.

Et il s’avançait vers l’enceinte de verdure, quand Bois-Rosé le retint.

« Laissez-moi faire ; cette haie impénétrable peut cacher l’ennemi. Mais non, ajouta-t-il, l’homme dont voici les pas n’a fait qu’écarter les vignes vierges qui s’enchevêtrent dans les arbres pour jeter un coup d’œil dans cet endroit. »

Bois-Rosé écarta aussi, en disant ces mots, les branches et le réseau grimpant qui les enlaçait ; mais, après un court examen dont le résultat ne lui présenta rien de remarquable, il se retira et laissa le rideau de verdure se refermer de lui-même.

Le chasseur suivit les empreintes ; mais plus loin le sol devenait calcaire, parsemé de pierres plates semblables aux pierres tumulaires dans les cimetières, et ne conservait plus de traces.