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La brise qui murmurait dans les roseaux de la rivière fut, en effet, la seule réponse qu’obtint le chef indien.

L’Oiseau-Noir reprit :

« L’aigle peut dérober sa trace dans l’air à l’œil d’un Apache, le saumon qui remonte les cataractes peut ne pas laisser son sillon après lui ; mais un blanc qui traverse les déserts n’est ni un aigle ni un saumon.

— Ni un oison non plus, murmura Pepe le Dormeur, et un oison seul pourrait se trahir en essayant de chanter. »

L’Indien écouta de nouveau ; mais la réponse de l’Espagnol n’était pas faite pour arriver jusqu’à lui.

« Les guerriers blancs du nord, reprit l’Oiseau-Noir sans se décourager, ne sont que trois ; et il appuya sur ce mot pour bien faire comprendre à ses auditeurs qu’il connaissait leur nombre comme leur position, ne sont que trois contre vingt, et les guerriers rouges engagent leur parole d’être pour eux des amis et des alliés.

— Ah ! dit le Canadien bas à Pepe, pour quelle perfidie l’Indien a-t-il besoin de nous ?

— Laissons-le dire et nous le saurons, répondit Pepe ; il n’a pas encore fini, ou je me trompe beaucoup.

— Quand les guerriers blancs connaîtront les intentions de l’Oiseau-Noir, ils sortiront de leur cachette, continua le chef apache ; ils vont les savoir : les hommes blancs du nord sont les ennemis de ceux du sud ; leur langage, leur Dieu ne sont pas les mêmes. Les Apaches tiennent dans leurs serres tout un camp de guerriers du sud.

— Les chercheurs d’or vont passer un mauvais moment, dit Bois Rosé.

— Si les guerriers du nord veulent joindre leurs longues carabines à canons rayés à celles des Indiens, ils partageront avec eux les chevelures, les trésors, les chevaux des hommes du sud, et les indiens et les blancs