Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome I, 1881.djvu/247

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de cet enfant n’eût pas été plus précieuse que la sienne propre, elle appela à son aide toute sa tendresse maternelle, toute l’énergie de sa volonté et de son orgueil pour suivre le doigt qui indiquait le berceau de son fils.

Certes, il fallait un effort inouï de courage pour y parvenir. Cependant, secouant enfin sa terreur, elle s’écria d’une voix affermie :

« Qui êtes-vous, vous qui vous introduisez ici furtivement, comme un voleur de nuit ? Est-ce ainsi qu’un fils doit rentrer dans la demeure de ses pères ? Don Antonio de Mediana n’est-il plus qu’un malfaiteur qui craint le jour ?

— Patience, répondit ironiquement don Antonio, le temps viendra, et ce temps n’est pas loin, où je rentrerai dans ce château comme il convient, en plein jour, par les grilles ouvertes, au milieu des acclamations qui salueront mon retour : mais ce soir il entre dans mes plans de n’être, comme vous le dites, qu’un voleur de nuit.

— Que voulez-vous donc ? s’écria la comtesse avec angoisse.

— Eh quoi ! ne comprenez-vous pas, reprit don Antonio avec son même calme qui, en dépit du tressaillement de ses muscles, dénotait une terrible résolution, que je viens ici pour me faire comte de Mediana ? »

Ainsi, aux yeux de la comtesse, la question prenait d’effrayantes proportions. Ce n’était plus un amant trompé qu’il fallait payer de raisons, comme elle l’avait un instant supposé ; c’était son fils qu’il fallait sauver.



CHAPITRE XXI

LA PROPHÉTIE.


À ces paroles, qui ne laissaient pas de doute à la comtesse sur les intentions de don Antonio, son premier mou-