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exactitude que bien des officiers de notre désastreuse expédition du Mexique, qui avaient emporté ces volumes pour se distraire, les ont lus et relus pour s’instruire, et n’ont pas constaté une seule erreur chez leur guide. Tout est reproduit avec une fidélité scrupuleuse dans des récits dont le naturel et la sobriété font de Ferry un émule de Prosper Mérimée. Chaque personnage tient le langage qui convient à sa situation. C’est à peine si, voulant à tout prix découvrir une tache, nous avons surpris dans les Squatters un chasseur d’éducation vulgaire s’écriant : « Ah ! voilà un pauvre diable d’ours qui apprend à ses dépens qu’il y a loin des pattes aux lèvres, » ce qui peut sembler invraisemblable, venant d’un esprit fort peu cultivé.

Mais le plus souvent chacun parle et agit ainsi que l’exigent le rang qu’il occupe, l’éducation qu’il a reçue. Jamais la sauvagerie de mœurs encore primitives n’a été mieux exposée. Jamais on n’a mieux mis en scène tout ce qui constitue l’originalité d’un pays la civilisation a jeté tout juste assez de lueurs pour éclairer ce qu’il renferme encore de sauvage. Les contrebandiers n’ayant pas de plus dévoués complices que les employés du fisc ; le gambusino, que pousse dans le désert la soif de l’or ; les dompteurs de chevaux sauvages et leurs prouesses ; les saltéadores inspirant un égal effroi à la justice dégradée et aux voyageurs qu’ils détroussent ; les pêcheurs de perles allant disputer