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« Eh bien ! pourquoi vous le cacher plus longtemps, s’écria Tiburcio animé par l’air attentif de Rosario, honneurs, richesses, puissance, je puis tout mettre à vos pieds, et c’est vous seule qui aurez fait ce miracle ! »

Si incrédules sur bien des points, les femmes croient volontiers aux miracles qu’elles opèrent.

Rosarita fixa sur Tiburcio des yeux interrogateurs.

« J’aurais dû vous dire plus tôt, peut-être, reprit-il en baissant les yeux sous un reproche de sa conscience, que ma mère adoptive est allée rejoindre celui qui m’a servi de père ; mais je n’ai pensé en venant ici qu’à une seule…

— Je le sais, interrompit la jeune fille, vous êtes seul à présent dans le monde, je l’ai appris ce soir de la bouche de mon père. »

La voix de Rosarita, en prononçant ces mots, était douce comme la brise qui soupirait dans les orangers, et sa main, fortuitement tombée dans la main de Tiburcio, ne se dérobait pas à son étreinte.

À cet aspect, la main de don Estévan cessait petit à petit de serrer le bras de Cuchillo.

« Ma mère est morte pauvre, continua Tiburcio, et cependant elle m’a laissé un inestimable héritage avec un legs de vengeance ; moi je n’ai vu dans ses dernières paroles qu’un secret dangereux, il est vrai, car il tue ceux qui le possèdent, mais ce secret du moins doit me fournir le moyen de m’élever jusqu’à votre opulence. La vengeance viendra plus tard, plus tard je chercherai le meurtrier d’Arellanos. »

À ces mots, Cuchillo pâlit et grinça des dents. Son bras était devenu libre, don Estévan ne le retenant plus, car la main de Rosarita était toujours dans celle de Tiburcio.

« Écoutez-moi donc, reprit ce dernier.

« À soixante lieues d’ici, dans un endroit que Marcos Arellanos a vu, mais en plein cœur des tribus indiennes, il existe lin placer d’or d’une richesse incalculable. Je sais où il est, il peut être à moi, si vous m’aimez, Rosa-