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projet, ses chances de réussite, et finit par ajouter en riant :

« Vous le voyez, le roi don Carlos compte déjà un partisan dans ce pays ! Mais il se fait tard, seigneur don Vicente, et je dois, avant la fin de cette soirée, réfléchir à des choses trop importantes pour les remettre à demain ; vous m’excuserez donc si je vous congédie. »

Le sénateur sortit de la chambre pour regagner la sienne, au milieu des rêves dorés de son opulence et de sa grandeur futures.



CHAPITRE XII

LE GUET-APENS.


Dans la partie la plus reculée des communs, se trouvait la chambre que don Augustin avait donnée aux quatre aventuriers : Pedro Diaz, Oroche, Cuchillo et Baraja. La connaissance s’était rapidement faite entre eux à table et se continuait au moment où nous les retrouvons.

À la clarté douteuse d’une longue et mince chandelle dont la mèche se charbonnait dans un chandelier de fer, assis sur un banc de chêne autour d’une large table, Cuchillo et Baraja, oublieux de tous leurs serments, avaient repris leur partie commencée la veille au matin.

Pedro Diaz ne semblait accorder au jeu qu’une attention machinale, tandis qu’assis à l’angle de la table massive, Oroche, la jambe droite relevée sur la jambe gauche, le coude appuyé sur son genou, attitude favorite des joueurs de vihuela, s’accompagnait sur la sienne en chantant les boleros et les fandagos les plus en vogue parmi la population du littoral.

Oroche, comme toujours, soigneusement enveloppé de