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— Vous n’irez pas si loin, répondit en souriant l’hacendero ; l’expédition est prête, et j’en attends le chef ici ce soir même ; il agréera vos services, j’en suis garant, et vous épargnera ainsi quelques jours de route.

— C’est à merveille, reprit Diaz, et je rends grâce à Dieu de cette coïncidence.

— La soif de l’or vous a donc aussi gagné ! demanda don Augustin à Pedro Diaz.

— Non pas, Dieu merci ! Je laisse le soin de chercher de l’or à un gambusino expérimenté, tel que le seigneur Oroche. Pour moi, vous le savez, je n’ai d’autre souci que d’user de représailles envers les Indiens pour tout le mal qu’ils m’ont fait, et c’est pourquoi j’ai saisi avec empressement l’occasion d’aller porter une fois de plus chez eux le fer et le feu qu’ils ont si souvent promenés parmi nous.

— C’est bien, reprit l’hacendero, qui, comme tous les habitants des frontières exposées aux incursions de ces ennemis implacables de la race blanche, nourrissait dans son cœur une haine égale à celle de Pedro Diaz. J’approuve de tels sentiments, et, si vous voulez me le permettre, je vous offrirai comme gage des miens un de mes meilleurs chevaux de selle ; l’Indien que vous poursuivrez sur ce noble animal devra être monté sur les ailes du vent si vous ne l’atteignez, quelque avance qu’il ait sur vous.

— Ce sera mon cheval de bataille, reprit Diaz les yeux brillants de joie, et j’ornerai sa crinière de chevelures indiennes, en mémoire de celui qui me l’aura donné. »

La conversation roula ensuite sur les expéditions du genre de celle que commandait don Estévan, ainsi que sur plusieurs autres sujets qui défrayent d’ordinaire l’entretien des fermiers mexicains ; et comme il était déjà nuit, et que l’hôte attendu n’arrivait pas, don Augustin donna l’ordre à deux domestiques de se munir de torches et d’aller à cheval au-devant de lui.

« Je ne sais quel accident peut avoir retardé la marche de don Estévan, dit l’hacendero quand ses ordres eurent