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Les Indiens étaient sous les ordres du capitaine Lantejas, et, quand il s’agit d’envoyer un exprès à Trujano, l’un d’eux assura qu’il connaissait, derrière le village, un passage secret, par lequel il se chargeait de parvenir jusqu’à lui. Don Cornelio en fit donner avis à Morelos, qui, en réponse, lui envoya l’ordre d’accompagner l’Indien avec quelques hommes de son choix. Cette commission était aussi dangereuse qu’honorable, et Lantejas aurait bien décliné l’honneur qui lui en revenait, s’il avait été libre de la refuser ; mais comme, à tout prendre, elle pouvait lui éviter le plus dangereux honneur encore de tuer trois ou quatre Espagnols, ou tout au moins un officier supérieur, et qu’il n’était pas libre de se soustraire à un ordre du général en chef, il accepta.

Il choisit pour compagnons d’aventures Clara et Costal, outre une douzaine de soldats sur lesquels il pouvait compter, et, la nuit venue, on se mit en route.

Au bout de deux heures environ, le détachement aperçut les feux des bivouacs espagnols ; puis, bientôt après, les maisons silencieuses de Huajapam, où les assiégés calculaient les heures et les minutes, en attendant le secours promis.

De l’emplacement où le guide indien fit faire halte aux hommes du capitaine (c’était derrière les murs de clôture d’un champ), un chemin creux conduisait jusqu’à l’endroit où la sentinelle espagnole allait et venait avec une certaine inquiétude, comme si elle eût senti les dangers de son poste.

C’était le même que celui qu’occupait la veille le factionnaire qui s’était embrouillé dans le compte de ses cadavres, et c’était encore par ce chemin creux que le premier Indien était venu en augmenter le nombre.

Plusieurs causes semblaient se réunir pour donner à la sentinelle ces allures inquiètes qui menaçaient de tout gâter : à la fraîcheur désagréable de la nuit se joignait l’odeur infecte des cadavres, qui blessait horri-