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pensait le prêtre ; il a avec lui un brave homme, ce vieux soldat, qui braverait tout pour venir nous prévenir…

Ces pensées le préoccupaient tellement qu’il ne s’apercevait pas que Mme d’Escorval s’appuyait de plus en plus lourdement à son bras.

— J’ai honte de l’avouer, dit-elle enfin ; mais je n’en puis plus, il y a si longtemps que je ne suis sortie, que j’ai comme désappris de marcher…

— Heureusement, nous approchons, madame, répondit l’abbé.

Bientôt, en effet, le fils Poignot arrêta sa charrette sur la grande route, devant le petit sentier qui conduit à la Borderie.

— Voilà le voyage fini !… dit-il au baron.

Et aussitôt, il donna un coup de sifflet, comme il l’avait fait quelques heures plus tôt, pour avertir de son arrivée.

Personne ne paraissant, il siffla de nouveau, plus fort, puis de toutes ses forces… rien encore.

Mme d’Escorval et l’abbé Midon le rejoignaient à ce moment.

— C’est singulier, leur dit-il, que Marie-Anne ne m’entende pas… Nous ne pouvons descendre M. le baron sans l’avoir vue, et elle le sait bien… Si je courais l’avertir ?

— Elle se sera endormie, répondit l’abbé, veillez sur votre cheval, mon garçon, je vais aller la réveiller…

Il quitta le bras de Mme d’Escorval sur ces mots, et gagna le sentier.

Certes, il n’avait pas l’ombre d’une inquiétude. Tout était calme et silence autour de la Borderie ; une lumière brillait aux fenêtres du premier étage.

Cependant, lorsqu’il vit la porte ouverte, un pressentiment vague tressaillit en lui.

— Qu’est-ce que cela veut dire ? pensa-t-il.

Au rez-de-chaussée il n’y avait pas de lumière, et