Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/87

Cette page a été validée par deux contributeurs.


IX


Jamais consultation au chevet d’un malade mourant de quelque mal inconnu, ne mit en présence deux médecins aussi différents que ceux qui, sur la réquisition du parquet, accompagnaient le commissaire de police.

L’un, grand, vieux, tout chauve, portait un large chapeau, et sur son vaste habit noir mal coupé, un paletot de forme antique. Celui-là était un de ces savants modestes, comme il s’en rencontre dans les quartiers excentriques de Paris, un de ces guérisseurs dévoués à leur art, qui, trop souvent, meurent ignorés après d’immenses services rendus.

Il avait ce calme débonnaire de l’homme qui, ayant ausculté toutes les misères humaines, comprend tout. Mais une conscience troublée ne soutenait pas son regard perspicace, plus aigu que ses lancettes.

L’autre, jeune, frais, blond, jovial, trop bien mis, cachait ses mains blanches et frileuses sous des gants de daim fourrés. Son œil ne savait que caresser ou rire. Il devait s’éprendre de toutes ces panacées miraculeuses