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vérité assez probable pour servir de base à une instruction.

Puis, il détaillait les pièces de conviction placées en ce moment devant lui.

C’étaient les flocons de laine marron recueillis sur le madrier, la précieuse boucle d’oreille, les clichés des différentes empreintes du jardin, le tablier aux poches retournées de la veuve Chupin.

C’était le revolver du meurtrier, dont trois coups sur cinq étaient encore chargés.

L’arme, bien que sans ornements, était remarquablement belle et soignée, et sur la crosse elle portait le nom d’un des premiers armuriers de Londres : Stephen, 14, Skinner-street.

Lecoq sentait bien qu’en fouillant les victimes il rassemblerait d’autres indices, très-précieux peut-être, mais cela il n’osa pas le faire. Il était encore trop petit garçon pour hasarder une telle démarche. D’ailleurs, il comprenait que s’il se risquait, Gévrol, furieux de s’être fourvoyé, ne manquerait pas de crier qu’en dérangeant l’attitude des corps il avait rendu les constatations des médecins impossibles.

Il se consola cependant, et il relisait son rapport, modifiant de ci et de là quelques expressions, lorsque le père Absinthe, qui était allé fumer une pipe sur le seuil de la porte, l’appela.

— Quoi de nouveau ?… répondit Lecoq.

— Voici Gévrol et deux de nos collègues qui ramènent avec eux le commissaire et deux messieurs bien mis.

C’était, en effet, le commissaire de police qui arrivait,