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cela ne le compromet en rien. Vous avez d’ailleurs un moyen simple d’écarter de lui les soupçons.

— Un moyen ! Lequel ? Oh ! dites vite….

— C’est de me répondre franchement, et de me mettre à même, vous qui êtes une honnête femme, d’arrêter le coupable. Parmi tous les amis de votre mari, n’en connaissez-vous pas de capables d’avoir fait le coup ?… Nommez-les moi.

L’hésitation de la malheureuse fut visible. Souvent, sans doute, elle avait assisté à d’ignobles conciliabules, et on avait dû la menacer de vengeances terribles si elle parlait.

— Vous n’avez rien à craindre, insista le jeune policier, et jamais, je vous le promets, on ne saura que vous m’avez dit un mot. Puis, quoi que vous disiez, vous ne m’apprendrez peut-être rien. On nous a conté déjà bien des choses de votre vie, sans parler des brutalités dont vous ont rendue victime Polyte et sa mère.

— Mon mari, monsieur, ne m’a jamais brutalisée, dit fièrement la jeune femme… Cela, d’ailleurs, ne regarde que moi.

— Et votre belle-mère ?

— Elle est peut-être un peu vive ; au fond, elle a bon cœur.

— Alors, pourquoi diable vous êtes-vous enfuie du cabaret de la veuve Chupin, puisque vous y étiez si heureuse ?

Toinon-la-Vertu était devenue cramoisie jusqu’à la racine des cheveux.

— Je me suis sauvée, répondit-elle, pour d’autres raisons. Il venait beaucoup d’hommes ivres là-bas, et des