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pourra peut-être nous donner quelque renseignement.

Mais l’autre hocha la tête d’un air découragé et ne bougea point.

— À quoi bon !… prononça-t-il. La présence d’esprit qu’a eue cet homme de donner un tour de clé l’a sauvé. Il a maintenant dix minutes d’avance sur nous, il est loin, nous ne le rattraperons pas.

Le vieil agent était blême de colère.

Il considérait maintenant comme son ennemi personnel ce rusé complice qui l’avait si cruellement mystifié ; il eût donné un mois de sa paye pour lui mettre la main au collet.

— Ah ! ce n’est pas le toupet qui lui manque, à ce brigand, dit-il, ni la chance !… Penser qu’il se moque de nous, comme une souris qui jouerait avec les griffes du chat, et que voici trois fois qu’il nous échappe… Trois fois !…

Le jeune policier était aussi irrité au moins que son collègue, et bien autrement blessé dans sa vanité. Mais il sentait la nécessité du sang-froid.

— Oui, répondit-il, d’un ton pensif, le mâtin est hardi et intelligent, et il ne reste pas les jambes croisées. Si nous travaillons, il se remue ferme. Ce démon-là est partout. De quelque côté que je pousse l’attaque, je l’y trouve sur la défensive. C’est lui, l’ancien, qui vous a fait perdre la piste de Gustave, c’est lui qui a organisé cette belle comédie de l’hôtel de Mariembourg…

— Et maintenant, objecta le bonhomme, d’un air capable, que le Général vienne donc nous chanter que c’est des fantômes que vous prétendez conduire au poste !…