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— Oui, je le sais, dit le jeune policier, Polyte a été arrêté il y a une quinzaine…

— Oh !… bien injustement, monsieur, je vous le jure. Il a été, comme toujours, entraîné par ses amis, des mauvais sujets. Il est si faible ; quand il a un verre de vin en tête, on en fait alors tout ce qu’on veut. De lui-même, il ne ferait pas de mal à un enfant, il n’y a qu’à le regarder…

Tout en parlant, elle attachait des regards enflammés à une mauvaise photographie suspendue au mur et qui représentait un affreux garnement à l’œil louche, à la bouche grimaçante à peine ombragée d’une légère moustache, portant des mèches de cheveux bien collées aux tempes. C’était là Polyte.

Et il n’y avait pas à s’y méprendre, cette malheureuse l’aimait toujours ; c’était son mari, d’ailleurs.

Une minute de silence suivit cette scène muette où éclatait la passion, et c’est pendant ce silence que la porte de la mansarde s’entr’ouvrit doucement.

Un homme avança la tête et la retira aussitôt avec une sourde exclamation. Puis, la porte se referma, la clé grinça dans la serrure, et on entendit des pas rapides dans l’escalier.

Assis dans la mansarde, le dos tourné à la porte, Lecoq n’avait pu apercevoir le visage de l’étrange visiteur.

Et, si promptement qu’il se fût retourné au bruit, il avait deviné le mouvement bien plutôt qu’il ne l’avait surpris.

Pourtant il n’eut pas l’ombre d’un doute.

— C’est lui, s’écria-t-il, le complice !