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tre qui ce complot ?… Contre vous, évidemment. D’un autre côté, vous prétendez n’être arrivé à Paris que ce soir-là même, et n’avoir été conduit à la Poivrière que par le plus grand des hasards… Conciliez donc cela.

Le prévenu osa hausser les épaules.

— Moi, dit-il, je vois les choses autrement. Ces gens tramaient un mauvais coup contre je ne sais qui, et c’est parce que je les gênais qu’ils m’ont cherché querelle à propos de rien.

Le coup du juge était bon, mais la parade était meilleure ; si bien que le souriant greffier ne put dissimuler une grimace approbative. Lui, d’abord, il était toujours du parti du prévenu… platoniquement, bien entendu.

— Passons aux faits qui ont suivi votre arrestation, reprit M. Segmuller. Pourquoi avez-vous refusé de répondre à toutes les questions ?…

Un éclair de rancune réelle ou de commande brilla dans l’œil du meurtrier.

— C’est bien assez d’un interrogatoire, grommela-t-il, pour faire un coupable d’un innocent !…

L’homme grossier reparaissait sous le pitre goguenard et bon enfant.

— Je vous engage, dans votre intérêt, dit sévèrement le juge, à rester convenable. Les agents qui vous ont arrêté ont observé que vous étiez au fait de toutes les formalités et que vous connaissiez les êtres de la prison.

— Eh ! monsieur, ne vous ai-je pas dit que j’avais été pris et mis en prison plusieurs fois, toujours faute de papiers… Je dis la vérité, par conséquent vous ne me ferez pas me couper, allez !…