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On lui reprochait un jour de voler l’Administration en ne travaillant pas :

— On me paye, je donne mon temps, répondit-il fièrement, on n’a rien à exiger de plus.

L’employé qui reçoit mal le public est pénétré de son importance. Il traite les administrés du haut de son pupitre. C’est dans le bureau de cet employé qu’un jour entra le ministre lui-même ; il ne le connaissait pas, le reçut très-mal, et finit par l’envoyer promener. Le soir même ce bureaucrate incongru était congédié. Malheureusement on l’a remplacé depuis, et il y a longtemps que le ministre ne s’est promené incognito.

L’employé ancien sous-officier tient sa canne comme un sabre et se coiffe le chapeau sur l’oreille ; ne dit pas : « je vais déjeuner, » mais « je vais manger la soupe, » appelle l’heure de la sortie « la retraite » et le ministère « la caserne ; » écrit supérieurement la bâtarde et débauche les autres sous prétexte d’aller boire la goutte.

C’est du reste ce qu’on appelle un bon garçon. Et