nez-moi pourquoi, malgré les ordres formels de votre patron, vous avez fait prendre l’argent à la Banque la veille et non le jour même du remboursement ?
— C’est que, monsieur, M. de Clameran m’avait fait savoir qu’il lui serait agréable, utile même, d’avoir ses fonds dès le matin ; il en témoignera, si vous le faites appeler. D’un autre côté, je présumais que j’arriverais tard à mon bureau.
— Ce M. de Clameran est donc de vos amis ?
— Aucunement ; j’ai même ressenti pour lui une sorte de répulsion que rien ne justifie, je le déclare ; mais il est fort lié avec mon ami M. de Lagors.
Pendant le temps assez long, indispensable à Sigault, le greffier, pour écrire les réponses du prévenu, M. Patrigent se creusait la tête. Il se demandait quelle scène avait pu avoir lieu entre M. Bertomy et son fils, pour transformer ainsi Prosper.
— Autre chose, reprit le juge d’instruction ; comment avez-vous passé votre soirée, la veille du crime !
— Au sortir de mon bureau, à cinq heures, j’ai pris le train de Saint-Germain et je me suis rendu au Vésinet, à la maison de campagne de M. Raoul de Lagors. Je lui portais 1,500 francs qu’il m’avait demandés et qu’en son absence j’ai laissés à son domestique.
— Vous a-t-on dit que M. de Lagors dût entreprendre un voyage.
— Non, monsieur, j’ignore même s’il est absent de Paris.
— Fort bien. Et en sortant de chez votre ami, qu’avez-vous fait ?
— Je suis revenu à Paris, et j’ai dîné dans un des restaurants du boulevard avec un de mes amis.
— Et ensuite ?
Prosper hésita.
— Vous vous taisez, reprit M. Patrigent ; alors je vais vous dire l’emploi de votre temps. Vous êtes rentré chez vous, rue Chaptal, vous vous êtes habillé, et vous vous êtes rendu à une soirée que donnait une de ces femmes