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Il le pria de signer son interrogatoire, et le reconduisit jusqu’à la porte de son cabinet, faveur rare, de sa part.

M. Fauvel sorti, Sigault, le greffier, se permit une observation.

— Voilà une affaire diablement obscure, dit-il. Si le caissier est adroit et ferme, il me paraît bien difficile de le convaincre.

— Peut-être, répondit le juge ; mais voyons les autres témoins.

Celui qui avait le numéro 4, n’était autre que Lucien, le fils aîné de M. Fauvel.

Ce jeune homme, grand et beau garçon, de vingt-deux ans, répondit qu’il aimait beaucoup Prosper, qu’il avait été fort lié avec lui et qu’il l’avait toujours considéré comme un honnête homme, incapable même d’une indélicatesse.

Il déclara qu’à cette heure encore, il ne pouvait s’expliquer comment et par quelle suite de circonstances fatales Prosper en était venu à commettre un vol. Il s’était aperçu que Prosper jouait, mais non autant qu’on le prétendait. Il n’avait jamais vu qu’il fît des dépenses au-dessus de ses moyens.

Au sujet de sa cousine Madeleine, il répondit :

— J’ai toujours pensé que Prosper était amoureux de Madeleine, et jusqu’à hier j’ai été convaincu qu’il l’épouserait, sachant que mon père ne s’opposerait pas à ce mariage. J’ai toujours attribué la désertion de Prosper à une brouille avec ma cousine, mais j’étais persuadé qu’ils finiraient par se réconcilier.

Ces renseignements, mieux encore que ceux de M. Fauvel, éclairaient le passé du caissier, mais ne révélaient en apparence aucun indice dont on pût tirer parti dans les conjonctures présentes.

Lucien signa sa déposition et se retira.

C’était au jeune Cavaillon à être interrogé.

Le pauvre garçon était, lorsqu’il se présenta devant le juge, dans un état à faire pitié.