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D’un bond il fut debout, il allait donc être interrogé.

— Marchons, dit-il, sans songer à réparer le désordre de sa toilette.

Pendant le trajet, son gardien lui dit :

— Vous avez du bonheur, vous allez avoir affaire à un bien brave homme.

Le gardien avait mille fois raison.

Doué d’une pénétration remarquable, ferme, incapable de parti pris, également éloigné d’une fausse pitié et d’une sévérité excessive, M. Patrigent possède, à un degré éminent, toutes les qualités qu’exige la délicate et difficile mission du juge d’instruction.

Peut-être manque-t-il de la fébrile activité, parfois nécessaire pour frapper vite et juste ; mais il possède une de ces patiences robustes que rien ne lasse ni ne décourage. Fort capable, d’ailleurs, de suivre pendant des années une instruction, comme il le fit lors de l’affaire des billets belges, dont il ne réunit les fils qu’après quatre ans d’investigations.

Aussi, était-ce dans son cabinet que venaient s’échouer les affaires éternelles, les enquêtes restées en chemin, les procédures incomplètes.

Tel est, aussi exactement que possible, l’homme vers lequel on conduisait Prosper ; et on le conduisait par un chemin bien difficile.

On lui fit suivre un long corridor, traverser une salle pleine de gendarmes de Paris, descendre un escalier, traverser une manière de souterrain, puis monter un étroit et raide escalier qui n’en finissait pas.

Enfin, il arriva dans une longue et étroite galerie, basse d’étage, sur laquelle ouvraient quantité de portes numérotées.

Le gardien du malheureux caissier l’arrêta devant une de ces portes.

— Nous y sommes, lui dit-il ; c’est ici que va se décider votre sort.

À cette réflexion du gardien, faite d’un ton de com-