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situation, sans une oppression douloureuse que révélait sa respiration plus pressée, sans les gouttes de sueur qui perlaient le long de ses tempes, trahissant d’horribles angoisses.

Chez le commissaire de police où il était resté plus de deux heures pendant qu’on était allé quérir des ordres, il avait causé avec les deux sergents de ville qui le gardaient.

— Vers midi, étant à jeun, il sentit, à ce qu’il déclara, le besoin de prendre quelque chose. On lui fit apporter à déjeuner du restaurant voisin, et il mangea d’assez bon appétit, et but presque toute une bouteille de vin.

Pendant qu’il était là, dix agents au moins et divers employés de la préfecture, qui tous les matins ont affaire aux commissaires de police, vinrent examiner curieusement sa contenance. Tous eurent la même opinion et la formulèrent dans des termes presque pareils. Ils disaient :

— C’est un solide mâtin !

Ou encore :

— Ce gaillard-là est trop tranquille pour n’être pas gardé a carreau.

Lorsqu’on lui annonça qu’un fiacre l’attendait en bas, il se leva vivement ; mais avant de descendre, il demanda la permission d’allumer un cigare, permission qui lui fut accordée.

Sous la porte de la maison du commissaire, se tient habituellement une marchande de fleurs. Il lui acheta un petit bouquet de violettes. Cette femme, comprenant qu’il était arrêté, et lui ayant dit en manière de remerciement :

— Bonne chance ! mon pauvre monsieur !

Il parut touché de cette marque banale d’intérêt et répondit :

— Merci, ma brave femme, mais il y a longtemps que je n’en ai plus.

Il faisait un temps magnifique, une resplendissante journée de printemps. Tout le long de la rue Montmar-