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peur, mais comment s’en assurer ? Il se souvint que les ruses les plus grossières sont celles qui réussissent le mieux, et confiant dans son étoile, il dit, à tout hasard :

— Je me permettrai, cher monsieur, de vous faire remarquer que ceci n’est point exact ; le billet vous a été confié pour être transmis à Gypsy.

Un geste désespéré de Cavaillon apprit à l’agent qu’il ne s’était pas trompé ; il respira.

— Je vous jure, monsieur, commença, le jeune commis…

— Ne jurez pas, cher monsieur, interrompit Fanferlot, tous les serments du monde sont inutiles. Non-seulement vous n’avez pas déchiré ce billet, mais vous êtes entré dans cette maison pour le remettre à qui de droit et vous l’avez dans votre poche.

— Non, monsieur, non !…

M. Fanferlot ne releva pas cette dénégation, il poursuivit de sa plus douce voix :

— Et ce billet, vous allez être assez aimable, j’en suis persuadé, pour me le communiquer ; croyez que sans une nécessité absolue…

— Jamais ! répondit Cavaillon.

Et croyant le moment favorable, il essaya, en donnant une violente secousse, de dégager son bras pris sous le bras de Fanferlot et de s’enfuir.

Mais il en fut pour sa tentative, l’agent de la sûreté est aussi fort que doux.

— Prenez garde de vous faire mal, mon jeune monsieur, dit l’homme de la préfecture, et croyez-moi, confiez-moi ce billet.

— Je ne l’ai pas !

— Allons, bon ! voici que vous allez me réduire à des extrémités pénibles. Savez-vous ce qui va arriver, si vous vous entêtez ? J’appellerai deux sergents de ville qui vous prendront chacun un bras et vous conduiront chez le commissaire de police, et une fois là, j’aurai la douleur de vous fouiller bon gré mal gré. Tenez, franchement, vous me désolez.