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— Se méfierait-il de quelque chose ? pensa Fanferlot.

Non, le jeune employé ne se défiait de rien ; seulement, ayant une commission à faire, craignant que son absence ne fût remarquée, il se demandait quel chemin prendre pour couper au plus court.

Bientôt, il se décida ; il gagna le faubourg Montmartre, le remonta et prit la rue Notre-Dame-de-Lorette. Il marchait très-vite, se souciant peu des murmures des passants qu’il coudoyait, et l’agent de la sûreté avait presque peine à le suivre.

Arrivé rue Chaptal, Cavaillon tourna court et entra dans la maison qui porte le numéro 39.

Il avait à peine fait trois pas dans le corridor assez étroit que, se sentant frapper sur l’épaule, il se retourna brusquement et se trouva face à face avec Fanferlot.

Il le reconnut très-bien, si bien qu’il devint tout pâle, et se recula, cherchant des yeux une issue pour fuir.

Mais l’agent de la sûreté avait prévu la tentation ; il barrait absolument le passage. Cavaillon se sentit pris.

— Que me voulez-vous ? demanda-t-il d’une voix étranglée par la peur.

Ce qui distingue surtout M. Fanferlot, dit l’Écureuil, de ses confrères, c’est sa douceur exquise et son urbanité sans égale.

Même avec ses pratiques il est parfait, et c’est avec les plus grands égards, avec les formules les plus obséquieuses de la civilité, qu’il empoigne et coffre les gens.

— Vous daignerez, cher monsieur, répondit-il, excuser la liberté grande, mais j’aurais à demander à votre obligeance un petit renseignement.

— Un renseignement, à moi ?

— À vous, oui, cher monsieur, à monsieur Eugène Cavaillon.

— Mais je ne vous connais pas.

— Oh ! que si ; vous m’avez très-bien vu ce matin. Il s’agit d’ailleurs de la moindre des choses, et si vous vou-