— Ça chauffe donc ?
— C’est-à-dire que ça brûle, patron, et que la place n’est plus tenable, parole d’honneur !
Tout en parlant, M. Verduret avait réparé l’économie de sa toilette, quelque peu dérangée pendant son sommeil.
Quand il eut achevé, il se jeta dans un fauteuil, pendant que Joseph Dubois restait respectueusement debout, sa casquette à la main, dans l’attitude du soldat qui va au rapport sans armes.
— Explique-toi, mon garçon, commença M. Verduret, et lestement, s’il te plaît ; pas de phrases.
— Voilà, bourgeois. Je ne sais pas quelles sont vos intentions, j’ignore vos moyens d’action, mais il faut en finir, frapper votre dernier coup, vite, très-vite.
— C’est votre avis, maître Joseph ?
— Oui, patron, parce que si vous attendez, si vous hésitez, si vous tergiversez, bonsoir la compagnie, vous ne trouverez plus qu’une cage vide, les oiseaux auront pris leur volée. Vous souriez ?… Oui, je sais bien que vous êtes fort, mais ils sont roués, eux aussi.
— Tu ne les as donc pas recommandés là-bas, quand je t’ai écrit ?
— Si, mais ils sont gens à glisser entre les doigts comme une anguille. Ils savent qu’ils ont du monde à leurs trousses.
— Mille diables ! s’écria M. Verduret, on aura commis quelque maladresse.
Cette conversation était par trop transparente pour ne pas donner beaucoup à réfléchir à Prosper ; aussi écoutait-il de toutes ses forces, tout en notant et la supériorité aisée de M. Verduret et la déférence très-sincère, on le sentait, du domestique.
— On n’a pas été maladroit, reprit Joseph ; la défiance de nos gaillards, vous en savez quelque chose, patron, date de loin. Ils se sont doutés de quelque chose le soir où vous vous êtes déguisé en paillasse, et la preuve, c’est le coup de couteau qu’ils vous ont allongé. Depuis, ils