— Expliquez-vous, monsieur.
— Il n’y a qu’une heure, répondit-il, que je sais comment, hier soir, Raoul, recourant aux plus infâmes violences, s’est fait livrer par sa mère la clé de la caisse et a volé trois cent cinquante mille francs.
La colère et la honte empourprèrent à ces mots les joues de Madeleine.
Elle se pencha sur sa tante : et lui saisissant les poignets qu’elle secoua :
— Est-ce vrai, cela ? demanda-t-elle d’une voix sourde, est-ce vrai ?
— Hélas ! gémit Mme Fauvel anéantie.
Madeleine se releva confondue de tant d’indigne faiblesse.
— Et tu as laissé accuser Prosper, s’écria-t-elle, tu le laisses déshonorer, il est en prison !
— Pardon !… murmura Mme Fauvel, j’ai eu peur, il voulait se tuer ; puis, tu ne sais pas… Prosper et lui étaient d’accord.
— Oh ! s’écria Madeleine, révoltée, on t’a dit cela et tu as pu le croire !…
Clameran jugea le moment d’intervenir.
— Malheureusement, dit-il d’un air navré, madame votre tante ne calomnie pas M. Bertomy.
— Des preuves ! monsieur ! des preuves !
— Nous avons l’aveu de Raoul.
— Raoul est un misérable !
— Je ne le sais que trop, mais enfin qui a révélé le mot ? qui a laissé l’argent en caisse ? M. Bertomy, incontestablement.
Ces objections ne parurent nullement toucher Madeleine.
— Et maintenant, dit-elle sans prendre la peine de cacher un mépris qui allait jusqu’au dégoût, savez-vous ce qu’est devenu l’argent ?
Il n’y avait pas à se méprendre au sens de cette question. Soulignée d’un regard écrasant, elle signifiait :
— Vous avez été l’instigateur du vol, et vous êtes le recéleur.