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parfaitement, pour l’avoir étudié et même essayé, — c’était un garçon prévoyant, — comment il fallait manœuvrer la clé dans la serrure.

Il l’introduisit doucement, donna un tour ; la poussa davantage, tourna une seconde fois ; l’enfonça tout à fait avec une secousse et tourna encore. Il avait des battements de cœur si violents que Mme Fauvel eût pu les entendre.

Le mot n’avait pas été changé ; la caisse s’ouvrit.

Raoul et sa mère, en même temps, laissèrent échapper un cri, elle de terreur, lui de triomphe.

— Referme !… s’écria Mme Fauvel, épouvantée de ce résultat inexplicable, incompréhensible, laisse… reviens…

Et, à moitié folle, elle se précipita sur Raoul, s’accrocha désespérément à son bras et le tira à elle avec une telle violence que la clé sortit de la serrure, glissa le long de la porte du coffre et y traça une longue et profonde éraillure.

Mais Raoul avait eu le temps d’apercevoir sur la tablette supérieure de la caisse trois liasses de billets de banque. Il les saisit de la main gauche et les glissa sous son paletot entre son gilet et sa chemise.

Épuisée par l’effort qu’elle venait de faire, succombant à la violence de ses émotions, Mme Fauvel avait lâché le bras de Raoul, et, pour ne pas tomber, se soutenait au dossier du fauteuil de Prosper.

— Grâce, Raoul, disait-elle, je t’en conjure, remets ces billets de banque dans la caisse, j’en aurai demain, je te le jure, dix fois plus, et je te les donnerai, mon fils, je t’en prie, aie pitié de ta mère !

Il ne l’écoutait pas ; il examinait l’éraillure laissée sur le battant ; cette trace du vol était très-visible et l’inquiétait.

— Au moins, poursuivait Mme Fauvel, ne prends pas tout, garde juste ce qu’il te faut pour te sauver, et laisse le reste.

— À quoi bon ? La soustraction en sera-t-elle moins découverte ?