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chait de n’avoir pas su dissimuler mieux ses impressions.

— Oh ! fit-il insoucieusement, c’est bien peu de chose, ce que j’ai constaté.

— Encore, voudrions-nous savoir… insista Prosper.

— Je viens simplement d’acquérir la preuve que ce coffre-fort a été tout récemment ouvert ou fermé, je ne sais lequel, avec une certaine violence et une grande précipitation.

— Comment cela ? demanda le commissaire de police devenu attentif.

— Ici, monsieur, tenez, sur la porte, apercevez-vous cette éraillure qui part de la serrure ?

Le commissaire prit la loupe dont venait de se servir l’agent de la sûreté, se baissa, et, à son tour, examina longuement et attentivement le coffre-fort. On distinguait très-bien une éraillure légère, qui avait enlevé une couche de vernis sur une longueur de douze ou quinze centimètres, de haut en bas.

— Je vois, dit le commissaire, mais qu’est-ce que-cela prouve ?

— Oh ! rien du tout, répondit Fanferlot ; c’est précisément ce que je disais.

Oui, en effet, Fanferlot disait cela, mais il ne le pensait pas.

Cette égratignure — récente, on ne pouvait le nier — avait pour lui une signification qui échappait aux autres ; il y découvrait une confirmation de ses suppositions. Il se disait que le caissier, eût-il pris des millions, n’avait aucune raison de se presser. Le banquier, au contraire, descendant de nuit, à pas de loup, dans la crainte d’éveiller le garçon couché à côté, venant pour dévaliser sa propre caisse, avait mille raisons de trembler, de se hâter, de retirer précipitamment la clé qui, glissant hors de la serrure, avait éraillé le vernis.

Résolu de démêler seul l’écheveau embrouillé de cette affaire, l’agent de la sûreté devait garder pour lui ses