lorsque, par un beau jour de janvier 1866, il mit le pied sur les quais de Bordeaux.
Il était parti jeune homme, le cœur gonflé d’espérances ; il revenait avec des cheveux blancs, ne croyant plus à rien.
Même, sa santé, dès son arrivée, se ressentit des orages de sa vie et d’un brusque changement de climat. Un rhumatisme articulaire le terrassa, et ce n’est qu’après plusieurs mois de souffrances qu’il put gagner la station des Eaux Chaudes, où, lui disaient ses médecins, il retrouverait la santé.
Guéri, il comprit que l’inactivité le tuerait. Et comme il avait été séduit par les magnificences des Pyrénées, comme il s’était épris des splendeurs de la vallée d’Aspe, il résolut de s’y fixer.
Une usine était à vendre, près d’Oloron, sur les bords du Gave, il l’acheta, songeant à trouver un moyen pour utiliser les immenses quantités de bois qui, faute de moyens de transport, se perdent dans les montagnes.
Il était installé depuis quelques semaines déjà, lorsqu’un soir son domestique lui remit la carte d’un étranger qui désirait le voir.
Il prit cette carte et lut : Louis de Clameran,
Il y avait bien des années que Gaston n’avait été remué par une émotion pareille. Tout son sang affluait à son cerveau, il frémit et chancela comme l’arbre frappé de la cognée.
Tous les sentiments qu’il croyait morts en lui éclataient avec une violence inouïe. Mille pensées, trop confuses pour être exprimées, se présentaient à la fois à son esprit, de même que les mots se pressaient sur ses lèvres.
— Mon frère ! s’écria-t-il enfin, mon frère !…
Et laissant là son domestique tout ébahi, quelque peu effaré même, de l’exaltation de son maître, il se lança dans les escaliers.
Au milieu du vestibule, un homme, Louis de Clameran, se tenait debout, attendant.