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voir de vos nouvelles ! Il est en terre, le pauvre bonhomme ; mais moi, Joseph, son fils, je vous appartiens comme lui-même. Vous, chez moi, quel bonheur ! Ah ! ma femme à qui j’ai tant parlé des Clameran va être bien heureuse !…

Il s’élança dehors en même temps criant à plein poumons :

— Toinette ! Hé ! Antoinette, écoute un peu ici, voir !…

Cet accueil si empressé, si cordial, remuait délicieusement Louis. Il y avait tant d’années qu’il n’avait entendu l’expression d’une affection sincère, d’un dévoûment désintéressé, qu’une main vraiment amie n’avait serré la sienne !

Mais déjà, rougissante et confuse, une belle jeune femme au teint brun, aux grands yeux noirs, entrait, à moitié traînée par Joseph.

— Voilà ma femme, monsieur le marquis, disait-il. Ah ! dame ! je ne lui ai pas laissé le temps d’aller se faire brave ; c’est monsieur le marquis, Antoinette.

La belle jeune femme s’inclinait, tout intimidée, et ne trouvant rien à dire, elle tendit son front, où Louis déposa un baiser.

Tout à l’heure, disait Joseph, monsieur le marquis verra les enfants, ils sont à l’école, je viens de les envoyer chercher.

En même temps, le mari et la femme s’empressaient autour du marquis.

Il devait avoir, disaient-ils, besoin de prendre quelque chose, étant venu à pied, il allait bien accepter un verre de vin, en attendant le déjeuner, car il leur ferait l’honneur de déjeuner chez eux, n’est-il pas vrai ?

Et Joseph descendait à la cave, pendant que Toinette, dans la cour, donnait la chasse au plus gras de ses poulets.

En moins de rien, tout fut prêt, et Louis s’assit, au milieu de la cuisine, devant une table chargée de tout ce qu’on avait pu se procurer de meilleur, servi par Joseph et sa femme, qui se tenaient devant lui, l’examinant avec une sorte de curiosité attendrie.