Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/275

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tout lui réussissait. Mais il voulait être très-riche, immensément riche, non pour lui, mais pour la femme aimée, qu’il voulait entourer de toutes les jouissances du luxe. La trouvant la plus belle, il la souhaitait la plus parée.

Dix-huit mois après son mariage, Mme  Fauvel avait eu un fils. Hélas ! ni cet enfant, ni un second venu un an après, ne purent lui faire oublier l’autre, le délaissé, celui que, pour une somme d’argent, une étrangère avait pris.

Aimant passionnément ses fils, les élevant comme des fils de prince, elle se disait :

— Qui sait si l’abandonné a seulement du pain ?

Si elle eût su où il était, si elle eût osé !… Mais elle n’osait pas. Parfois même elle avait été inquiète du dépôt laissé par Gaston, de ces parures de la marquise de Clameran, qu’elle craignait de ne jamais assez bien cacher.

Parfois, elle se disait : « Allons… le malheur m’a oubliée ! »

Pauvre femme ! Le malheur est un visiteur qui parfois se fait attendre, mais qui toujours vient.


XV


Louis de Clameran, le second fils du marquis, était de ces natures concentrées qui, sous des dehors froids ou nonchalants, dissimulent un tempérament de feu, d’exorbitantes passions et les plus furieuses convoitises.

Toutes sortes d’extravagantes pensées et de levains mauvais fermentaient en son cerveau malade, longtemps avant les événements qui décidèrent des destinées de la maison de Clameran.