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blement qui le secouait exprimaient si bien une affreuse angoisse, que tous les employés ensemble se levèrent et coururent à lui.

Il se laissa presque tomber entre leurs bras, il ne pouvait plus se soutenir, il se trouvait mal, il fallut l’asseoir.

Cependant ses collègues l’entouraient, l’interrogeant tous à la fois, le pressant de s’expliquer.

— Volé, disaient-ils ; où, comment, par qui ?

Peu à peu, Prosper revenait à lui.

— On a pris, répondit-il, tout ce que j’avais en caisse.

— Tout ?

— Oui, trois paquets de cent billets de mille francs et un de cinquante. Les quatre paquets étaient entourés d’une feuille de papier et liés ensemble.

Avec la rapidité de l’éclair la nouvelle d’un vol s’était répandue dans la maison de banque ; les curieux accoururent de toutes parts ; le bureau était plein.

— Voyons, disait à Prosper le jeune Cavaillon, on a donc forcé la caisse ?

— Non, elle est intacte.

— Eh bien, alors…

— Alors il n’en est pas moins un fait, c’est qu’hier soir j’avais 350,000 francs, et que je ne les retrouve plus ce matin.

Tout le monde se taisait ; seul, un vieil employé ne partagea pas la consternation générale.

— Ne perdez donc pas ainsi la tête, M. Bertomy, dit-il ; songez que le patron doit avoir disposé des fonds.

Le malheureux caissier se dressa tout d’une pièce ; il s’accrochait à cette idée.

— Oui, s’écria-t-il, en effet, vous avez raison ; ce sera le patron.

Puis réfléchissant :

— Non, reprit-il d’un ton de découragement profond, non, ce n’est pas possible. Jamais, depuis cinq ans que je tiens la caisse, M. Fauvel ne l’a ouverte sans moi. Deux ou trois fois il a eu besoin de fonds, et il m’a at-