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— Êtes-vous content, M. Verduret ? demanda-t-il.

— Oui et non, monsieur le comte. Non, parce que je n’ai pas atteint complètement le but que je me proposais quand je vous ai prié de me faire admettre ici ; oui, parce que nos deux coquins se sont livrés de telle façon que le doute n’est plus possible.

— Et vous vous plaignez ?…

— Je ne me plains pas, monsieur le comte ; je bénis au contraire le hasard, je devrais dire la Providence, qui vient de me révéler l’existence d’un secret dont je ne me doutais pas.

Cinq ou six invités qui, ayant aperçu le comte, s’approchaient de lui, interrompirent cette conversation. Le comte s’éloigna, mais non sans adresser au paillasse un salut plus amical encore que protecteur.

Lui, aussitôt, déposant sa bannière, se lança dans la foule devenue si pressée, qu’on ne circulait qu’avec les plus grandes difficultés. Il cherchait Mme  Fauvel. Elle avait quitté la galerie, et il la trouva établie sur une banquette du grand salon, causant avec Madeleine. Elles étaient, l’une et l’autre, fort animées.

— Bon ! pensa le paillasse, elles s’entretiennent de la scène ; mais que sont donc devenus Lagors et Clameran ?

Il ne tarda pas à les apercevoir. Ils allaient et venaient, traversant les groupes, saluant, adressant la parole à une foule de personnes.

— Je parierais, murmura le paillasse, qu’il est question de moi. Ces honorables messieurs cherchent à savoir qui je suis. Cherchez, mes bons amis, cherchez…

Bientôt ils y renoncèrent. Ils étaient si préoccupés, ils éprouvaient un tel besoin de se trouver seuls pour réfléchir et délibérer, que sans attendre le souper, ils allèrent prendre congé de Mme  Fauvel et de sa nièce, annonçant qu’ils se retiraient.

Ils disaient vrai. Le paillasse les vit gagner le vestiaire, prendre leurs manteaux, descendre le grand escalier et disparaître sous le porche.