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Quand on quitte la petite gare du Vésinet, on trouve devant soi deux routes. L’une à gauche, macadamisée, soigneusement entretenue, mène au village, dont on aperçoit, à travers les arbres, l’église neuve ; l’autre, à droite, nouvellement tracée et à peine sablée, conduit en plein bois.

Le long de cette dernière qui, avant cinq ans, sera une rue, on ne rencontre encore que de rares maisons, bâtisses d’un goût déplorable, pour la plupart, s’élevant de loin en loin, au milieu d’éclaircies d’arbres, retraites champêtres de négociants parisiens, inhabitées pendant l’hiver.

C’est au point de rencontre de ces deux routes que, sur les neuf heures du soir, Prosper fit arrêter le fiacre où il était monté, place du Palais-Royal, avec M. Verduret.

Le cocher avait gagné ses cent francs. Les chevaux étaient exténués, mais il y avait cinq minutes que M. Verduret et Prosper distinguaient la lueur des lanternes d’une voiture de place comme la leur, trottant à une cinquantaine de mètres en avant.

Descendu le premier du fiacre, M. Verduret tendit au cocher un billet de banque.

— Voici, lui dit-il, ce que je t’ai promis. Tu vas aller à la première auberge que tu trouveras à main droite en entrant dans le village. Si dans une heure nous ne t’avons pas rejoint, tu seras libre de rentrer à Paris.

Le cocher se confondit en remercîments ; mais ni Prosper ni son compagnon ne les entendirent.

Ils s’étaient élancés au pas de course sur le chemin désert.