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À mesure que lisait, à haute voix, l’homme aux favoris roux, la colère de Prosper grandissait. Colère folle, car il ne savait comment s’expliquer les événements qui se succédaient, et il sentait sa raison s’égarer.

— Tout le monde veut donc que je parte, s’écria-t-il : c’est donc une conjuration !

M. Verduret dissimula un sourire de satisfaction.

— Enfin ! fit-il, vous ouvrez les yeux, vous commencez à comprendre. Oui, mon enfant, il est des gens qui vous haïssent pour tout le mal qu’il vous ont fait ; oui, il est des gens pour qui votre présence à Paris serait une perpétuelle menace, et qui veulent vous éloigner à tout prix.

— Mais quels sont ces gens, monsieur ? dites-le moi ; dites-moi qui se permet de m’envoyer cet argent.

L’ami de M. Bertomy le père hocha tristement la tête.

— Si je le savais, mon cher Prosper, répondit-il, ma tâche serait remplie, car je saurais alors qui a commis le vol dont vous avez été accusé. Mais nous allons chercher.

Je tiens enfin un de ces indices qui deviennent tôt ou tard une charge accablante. Je n’avais que des déductions plus ou moins probables ; j’ai maintenant un fait qui me prouve que je ne me trompais pas. Je marchais dans les ténèbres ; à présent, j’ai une lueur pour me guider.

M. Verduret, cet homme aux apparences triviales, à l’entrain facile du commis voyageur, trouvait, quand bon lui semblait, de ces accents impérieux qui imposent aux âmes faibles et dominent les esprits malades.

Prosper, en l’écoutant, reprenait quelque assurance et sentait, en lui, renaître l’espoir.

— Il s’agit, poursuivait M. Verduret, de tirer parti de cet indice que nous livre l’imprudence de vos ennemis. Commençons par interroger le portier.

Il ouvrit la porte et appela :

— Hé ! mon brave ! avancez un peu s’il vous plaît.

Le concierge, homme fort poli, s’approcha en tortil-