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Tout en parlant, M. Lecoq avait pris sur son bureau, déroulé et étalé, une immense feuille de papier à dessin.

Sur cette feuille était photographiée la porte du coffre-fort de M. Fauvel. Tous les détails étaient rendus avec la dernière exactitude. On reconnaissait bien les cinq boutons mobiles avec les lettres gravées et l’étroite serrure à saillie de cuivre. L’éraillure y était indiquée avec une admirable netteté.

— Voici donc, commença M. Lecoq, notre éraillure. Elle va de haut en bas, à partir du trou de la serrure, diagonalement, et, remarque-le bien, de gauche à droite, c’est-à-dire qu’elle se termine du côté de la porte de l’escalier dérobé conduisant aux appartements du banquier. Très-profonde près de la serrure, elle finit en rayure à peine distincte.

— Oui, patron, c’est bien cela, je vois.

— Naturellement tu as pensé que cette éraillure doit avoir été faite par l’auteur de la soustraction ? Voyons si tu as eu raison. J’ai, ici, un petit coffret de fer, peint en vert comme la caisse de M. Fauvel ; le voici. Prends une clé et essaie de le rayer.

Sans trop deviner le but que se proposait son patron, l’agent de la sûreté fit ce qu’il lui commandait, frottant vigoureusement sur le coffret avec le bout d’une clé.

— Diable ! fit-il, après deux ou trois tentatives, elle est dure à entamer, cette peinture.

— Très-dure, en effet, mon garçon, et cependant celle du coffre-fort est plus solide encore, je m’en suis assuré. Donc l’éraillure que tu as relevée n’a pu être faite par la main tremblante d’un voleur laissant glisser la clé !

— Sapristi ! exclama Fanferlot stupéfait, je n’aurais pas trouvé cela. C’est que c’est vrai, il faut, pour rayer le coffre, qu’on ait appuyé très-fort.

— Oui, mais pourquoi ? Tel que tu me vois, je me creuse la tête depuis trois jours, et c’est hier seulement que j’ai trouvé. Examinons ensemble si mes conjectures présentent assez de chances de probabilité pour devenir le point de départ de mon enquête.