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— Il est des causes, reprit-il doucement, qui se défendent seules. Mlle Courtois est une de ces jeunes filles qui ont droit à tous les respects. Mais il est de ces abominations qu’aucune législation ne saurait atteindre, et qui me révoltent. Il faut songer, messieurs, que notre réputation, l’honneur de nos femmes et de nos filles, sont à la merci du premier gredin doué d’assez d’imaginative pour inventer une abomination. On ne le croira peut-être pas, peu importe, on répétera sa calomnie, on la propagera. Qu’y faire ? Pouvons-nous savoir ce qui se dit contre nous, en bas, dans l’ombre ; le saurons-nous jamais ?

— Eh ! répliqua le docteur Gendron, que nous importe ? Il n’est pour moi qu’une voix respectable, celle de la conscience. Quant à ce qu’on appelle l’opinion publique, comme c’est en réalité la somme des opinions particulières de milliers d’imbéciles et de méchants, je m’en moque comme de l’an quarante.

La discussion se serait peut-être prolongée, sans le juge d’instruction qui, ayant tiré sa montre, fit un geste de dépit.

— Nous causons, dit-il, nous parlons et l’heure marche. Il faut nous hâter. Partageons-nous, au moins, la besogne qui reste.

Le ton impérieux de M. Domini glaça sur les lèvres de M. Lecoq quelques réflexions dont il attendait le placement.

Il fut alors convenu que, pendant que le docteur Gendron procéderait à l’autopsie, le juge d’instruction rédigerait son projet de rapport.

Le père Plantat restait chargé de surveiller la suite des investigations de l’homme de la préfecture de police.

Dès que l’agent de la sûreté se trouva seul avec le vieux juge de paix.

— Enfin, dit-il, en respirant longuement, comme s’il eût été soulagé d’une lourde oppression, enfin, nous allons pouvoir marcher maintenant.