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Elle laissa retomber la portière ; il était temps, Hector entrait. Il était plus pâle que la mort, ses yeux avaient une affreuse expression d’égarement.

— Nous sommes perdus, dit-il, on nous poursuit. Vois, cette lettre que je viens de recevoir, ce n’est pas l’homme dont elle porte la signature qui l’a écrite, il me l’a dit. Viens, partons, quittons cet hôtel…

Laurence l’écrasa d’un regard plein de haine et de mépris, et dit :

— Il est trop tard.

Sa contenance, sa voix étaient si extraordinaires que Trémorel, malgré son trouble, en fut frappé et demanda :

— Qu’y a-t-il ?

— On sait tout, on sait que vous avez assassiné votre femme.

— C’est faux.

Elle haussa les épaules.

— Eh bien ! oui, c’est vrai, oui, c’est que je t’aimais tant !…

— Vraiment ! Est-ce aussi par amour pour moi que vous avez empoisonné Sauvresy ?

Il comprit, qu’en effet, il était découvert, qu’on l’avait attiré dans un piège, qu’on était venu, en son absence, informer Laurence de tout. Il n’essaya pas de nier.

— Que faire ? s’écria-t-il, que faire ?

Laurence l’attira vers elle, et, d’une voix frémissante, elle murmura :

— Sauvez le nom de Trémorel, il y a des armes ici.

Il recula, comme s’il eût vu la mort elle-même.

— Non, fit-il, non, je peux encore fuir, me cacher ; je pars seul, tu viendras me rejoindre.

— Je vous l’ai déjà dit, il est trop tard, la police a cerné la maison. Et vous savez, c’est le bagne ou l’échafaud.

— On peut se sauver par la cour.

— Elle est gardée, voyez.