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bles. Ces maraudeurs que nous tenons, ce jardinier qui n’a pas reparu doivent être pour quelque chose dans ce crime abominable.

Depuis quelques minutes déjà, le père Plantat dissimulait tant bien que mal, plutôt mal que bien, des signes d’impatience.

— Le malheur est, dit-il, que si Guespin est coupable, il ne sera pas assez sot pour se présenter ici.

— Oh ! nous le trouverons, répondit M. Domini ; avant de quitter Corbeil, j’ai envoyé à Paris, à la préfecture de police, une dépêche télégraphique pour demander un agent de la police de sûreté, et il sera, je l’imagine, ici avant peu.

— En attendant, proposa le maire, vous désireriez peut-être, monsieur le juge d’instruction, visiter le théâtre du crime.

M. Domini eut un geste comme pour se lever et se rassit aussitôt.

— Au fait, non, dit-il, autant ne rien voir avant l’arrivée de notre agent. Mais j’aurais bien besoin de renseignements sur le comte et la comtesse de Trémorel.

Le digne maire triompha de nouveau.

— Oh ! je puis vous en donner, répondit-il vivement, et mieux que personne. Depuis leur arrivée dans ma commune, j’étais, je puis le dire, un des meilleurs amis de monsieur le comte et madame la comtesse. Ah ! monsieur, quels gens charmants ! et excellents, et affables, et dévoués !…

Et, au souvenir de toutes les qualités de ses amis, M. Courtois éprouva une certaine gêne dans la gorge.

— Le comte de Trémorel, reprit-il, était un homme de trente-quatre ans, beau garçon, spirituel jusqu’au bout des ongles. Il avait bien, parfois, des accès de mélancolie pendant lesquels il ne voulait voir personne, mais il était d’ordinaire si aimable, si poli, si obligeant ; il savait si bien être noble sans morgue, que tout le monde dans ma commune l’estimait et l’adorait.

— Et la comtesse ? demanda le juge d’instruction.