per l’imagination de ses auditeurs, crut devoir rouler des yeux terribles et prendre une voix sinistre :
— … Ensuite, il a acheté un couteau poignard.
Le juge d’instruction ne se sentait pas d’aise, il battait M. Lecoq sur son terrain, il triomphait.
— Eh bien ! demanda-t-il de son ton le plus ironique à l’agent de la sûreté, que pensez-vous maintenant de votre client ? Que dites-vous de cet honnête et digne garçon qui, le soir même du crime, renonce à une noce où il se serait amusé, pour s’en aller acheter un marteau, un ciseau, un poignard, tous les instruments, en un mot, indispensables pour l’effraction et le meurtre.
Le docteur Gendron paraissait quelque peu déconcerté de ces incidents qui tout à coup se produisaient, mais un fin sourire errait sur les lèvres du père Plantat.
Pour M. Lecoq, il avait la mine impayable d’un homme supérieur scarifié d’objections qu’il sait devoir d’un mot réduire à néant, résigné à voir gaspiller en parlages oiseux, un temps qu’il mettrait utilement à profit.
— Je pense, monsieur, répondit-il bien humblement, que les assassins du Valfeuillu n’ont employé ni marteau, ni ciseau, ni lime, qu’ils n’avaient pas apporté d’outils du dehors, puisqu’ils se sont servis d’une hache.
— Ils n’avaient pas de poignard non plus ? demanda le juge, de plus en plus goguenard, à mesure qu’il se sentait plus sûr d’être sur la bonne voie.
— Ceci, dit l’agent de la sûreté, c’est une autre question, je l’avoue, mais qui n’est pas difficile à résoudre…
Il commençait à perdre patience. Il se retourna vers l’agent de Corbeil et assez brusquement lui demanda :
— C’est tout ce que vous savez ?
L’homme aux gros sourcils toisa d’un air dédaigneux ce petit bourgeois bénin, à tournure mesquine qui se permettait de l’interroger ainsi. Il hésitait si bien à l’honorer d’une réponse que M. Lecoq dut répéter sa question, brutalement, cette fois.