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a pourtant le sommeil bien léger ! Après cela, il est peut-être sorti.

— Malheur ! s’écria Philippe, on les aura assassinés tous les deux !

Ces mots dégrisèrent les domestiques dont la gaîté annonçait un nombre très-raisonnable de santés bues au bonheur des nouveaux époux.

M. Courtois, lui, paraissait étudier l’attitude du vieux Bertaud.

— Un assassinat ! murmura le valet de chambre ; ah ! c’est pour l’argent, alors, on aura su…

— Quoi ? demanda le maire.

— Monsieur le comte a reçu hier dans la matinée une très-forte somme.

— Ah ! oui, forte, ajouta une femme de chambre, il y avait gros comme cela de billets de banque. Madame a même dit à monsieur qu’elle ne fermerait pas l’œil de la nuit avec cette somme immense dans la maison.

Il y eut un silence, chacun se regardant d’un air effrayé. M. Courtois, lui, réfléchissait.

— À quelle heure êtes-vous partis hier soir, demanda-t-il aux domestiques.

— À huit heures, on avait avancé le dîner.

— Vous êtes partis tous ensemble ?

— Oui, monsieur.

— Vous ne vous êtes pas quittés ?

— Pas une minute.

— Et vous revenez tous ensemble ?

Les domestiques échangèrent un singulier regard.

— Tous, répondit une femme de chambre qui avait la langue bien pendue… c’est-à-dire, non. Il y en a un qui nous a lâchés en arrivant à la gare de Lyon, à Paris : c’est Guespin.

— Ah !

— Oui, monsieur, il a filé de son côté en disant qu’il nous rejoindrait aux Batignolles, chez Wepler, où se faisait la noce.

Monsieur le maire donna un grand coup de coude au