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— Vite, pendant que nous sommes seuls, dit Sauvresy, voici tes bijoux. Ah ! j’ai eu du mal à les avoir. Ils sont méfiants au mont-de-piété. Je pense bien qu’ils ont commencé par me prendre pour l’associé d’une bande de filous.

— Tu n’as pas dit mon nom, au moins !

— Ça été inutile. Mon notaire, par bonheur, était avec moi. Non, on ne saura jamais tout ce qu’un notaire peut rendre de services. Ne penses-tu pas que la société est injuste envers les notaires ?

Trémorel pensait que son ami parlait bien lestement de choses sérieuses, tristes même, et cette légèreté de ton le contrariait.

— Pour finir, poursuivait Sauvresy, j’ai rendu visite à miss Fancy. Elle était au lit depuis la veille, on l’y avait portée après ton départ, et depuis la veille, m’a dit sa femme de chambre, elle ne cessait de sangloter à fendre l’âme.

— Elle n’avait reçu personne ?

— Personne absolument. Elle te croyait bien mort, et quand je lui ai affirmé que tu étais chez moi, très-vivant et très-bien portant, j’ai cru qu’elle deviendrait folle de joie. Sais-tu qu’elle est vraiment jolie ?

— Oui… elle n’est pas mal.

— Puis c’est, je crois, une bonne personne. Elle m’a dit des choses extrêmement touchantes. Je parierais presque, mon cher ami, qu’elle ne tient pas seulement à ton argent, et qu’elle a pour toi une sincère affection.

Hector eut un beau sourire de fatuité. Affection !… le mot était pâle.

— Bref, ajouta Sauvresy, elle voulait à toute force me suivre, pour te voir, pour te parler. J’ai dû, pour obtenir qu’elle me laissât me retirer, lui jurer, avec d’épouvantables serments, qu’elle te verrait demain, non à Paris puisque tu m’as déclaré que tu n’y voulais plus y remettre les pieds, mais à Corbeil.

— Ah ! comme cela…

— Donc, demain à midi, elle sera à la gare. Nous par-