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la Gazette des Tribunaux. Sans doute, bien des détails lui échappaient, il ignorait le point de départ, mais il voyait les choses en gros.

Ayant pénétré le système du juge de paix, il avait suivi pas à pas le travail de la pensée de cet observateur si délié, et il découvrait les complications d’une affaire qui avait paru si simple à M. Domini. Son esprit subtil, exercé à dévider l’écheveau tenu des déductions reliait, entre elles, toutes les circonstances qui s’étaient révélées à lui dans la journée, et c’est sincèrement qu’il admirait le père Plantat.

Tout en regardant le portrait chéri, il pensait :

— À nous deux, ce rusé bonhomme et moi, nous expliquerons tout.

Il s’agissait cependant de ne se pas montrer trop inférieur.

— Monsieur, dit-il, pendant que vous interrogiez ce coquin qui nous sera bien utile, je n’ai pas perdu mon temps. J’ai regardé un peu partout, sous les meubles, et j’ai trouvé ce chiffon de papier.

— Voyons.

— C’est l’enveloppe, de la lettre de Mlle Laurence. Savez-vous où demeure la tante chez laquelle elle était allée passer quelques jours ?

— À Fontainebleau, je crois.

— Eh bien, cette enveloppe porte le timbre de Paris, bureau de la rue Saint-Lazare ; je sais que ce timbre ne prouve rien…

— C’est toujours un indice.

— Ce n’est pas tout ; je me suis permis de lire la lettre de Mlle Laurence, restée sur la table.

Involontairement le père Plantat fronça le sourcil.

— Oui, reprit M. Lecoq, ce n’est peut-être pas fort délicat, mais qui veut la fin veut les moyens ! Eh bien ! monsieur, vous l’avez lue, cette lettre, l’avez-vous méditée, avez-vous étudié l’écriture, pesé les mots, retenu la contexture des phrases.