Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/529

Cette page a été validée par deux contributeurs.

n’avait-il pas attendu de bien posséder tous les éléments de cette grave affaire, de tenir tous les fils de cette trame compliquée ?

On accuse la justice de lenteur, mais c’est cette lenteur même qui fait sa force et sa sûreté, qui constitue sa presque infaillibilité.

On ne sait pas assez tout le temps que les témoignages mettent à se produire.

On ignore ce que peuvent révéler de faits des investigations inutiles en apparence.

Les drames de la cour d’assises n’observent pas les trois unités, il s’en manque de beaucoup.

Quand l’enchevêtrement des passions et des mobiles semble inextricable, un personnage inconnu, venu on ne sait d’où, se présente, et c’est lui qui apporte le dénoûment.

M. Daburon, le plus prudent des hommes, avait cru simple la plus complexe des affaires. Il avait agi comme pour un cas de flagrant délit dans un crime mystérieux qui réclamait les plus grandes précautions. Pourquoi ? C’est que ses souvenirs ne lui avaient pas laissé la liberté de délibération, de jugement et de décision. Il avait craint également de paraître faible et de se montrer violent. Se croyant sûr de son fait, l’animosité l’avait emporté. Et cependant bien des fois il s’était dit : Où est le devoir ? Mais, quand on en est réduit à ne plus distinguer clairement le devoir, c’est qu’on fait fausse route.