Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/445

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rosité de sentiments, en celui que vous faites si facilement un assassin. Et je l’ai vu bien malheureux cependant, lorsque tout le monde enviait son sort. Il est, comme moi, seul en ce monde ; son père ne l’a jamais aimé. Appuyés l’un sur l’autre, nous avons traversé de tristes jours. Et c’est à cette heure que nos épreuves finissent qu’il serait devenu criminel ! Pourquoi, dites-le-moi, pourquoi ?…

— Ni le nom, ni la fortune du comte de Commarin ne lui appartenaient, mademoiselle, et il l’a su tout à coup. Seule, une vieille femme pouvait le dire. Pour garder sa situation, il l’a tuée.

— Quelle infamie ! s’écria la jeune fille, quelle calomnie honteuse et maladroite ! Je la sais, monsieur, cette histoire de grandeur écroulée ; lui-même est venu me l’apprendre. C’est vrai, depuis trois jours ce malheur l’accablait. Mais, s’il était consterné, c’était pour moi bien plus que pour lui. Il se désolait en pensant que peut-être je serais affligée quand il m’avouerait qu’il ne pouvait plus me donner tout ce que rêvait son amour. Moi affligée ! Eh ! que me font ce grand nom et cette fortune immense ! Je leur ai dû le seul malheur que je connaisse. Est-ce donc pour cela que je l’aime ! Voilà ce que j’ai répondu. Et lui, si triste, il a aussitôt recouvré sa gaîté. Il m’a remerciée en disant : « Vous m’aimez, le reste n’est plus rien. » Je lui ai fait alors une querelle pour avoir douté de moi. Et après cela il serait allé as-